Interview de Matt (@dessins2matt) : il sort son manga en tant que mangaka français

Retrouvez l’interview de Matt alias dessins2matt sur les réseaux sociaux. Passionné et rêveur, Matt s’apprête à sortir son premier manga « Les Héritiers de Merlin » avec la maison d’édition Punchline Édition. Il a accepté de nous partager son expérience, son ressenti et ses conseils.

📝C'est parti pour l'interview

  • 👋 Merci Mattéo (dessins2matt) de répondre à cette interview ! Pour commencer, est-ce tu peux te présenter ? Qu’est-ce que tu peux nous dire sur toi ?
Bonjour, je suis Mattéo, j’ai 23 ans, plus connu sur les réseaux sociaux sous le nom de « dessins2matt ». Je suis apprenti mangaka depuis trois ans à l’école japonaise « Human Academy Europe » où je termine actuellement mon cursus. Avant cela, je n’envisageais pas de faire du dessin mon métier. J’ai passé un bac scientifique à Aix-en-Provence, puis je me suis orienté vers la médecine, plus spécifiquement vers le métier de kinésithérapeute. Juste après avoir obtenu mon bac, je suis parti à Bruxelles, en Belgique, pour intégrer une école de kiné (je ne voulais pas faire la PACES à l’époque). Malheureusement, ma première année a été perturbée par l’arrivée du Covid-19 et plusieurs problèmes personnels. Malgré cela, j’ai persisté et entamé ma deuxième année, où j’ai finalement dessiné davantage et commencé à poster sur les réseaux sociaux plutôt que d’apprendre mes cours d’anatomie. Je voulais redécorer mon appartement, et par manque de moyens, je suis allé chez Action, j’ai acheté des feutres et j’ai commencé à redessiner mes personnages de manga favoris, puis à poster ces dessins en ligne. C’est en postant ces dessins que j’ai pris confiance en moi et que j’ai rencontré beaucoup d’artistes, comme @ed_arya, qui est maintenant ma binôme dans la réalisation du manga « Les héritiers de Merlin ».
  • 📚 Ta passion des manga, des animes, du Japon… Ça t’est venu comment ?
Je pense que tout a commencé, comme pour beaucoup, dans la cour de récréation avec les cartes Pokémon, Dragon Ball ! Puis, grâce à mon cousin, j’ai découvert Naruto. Arrivé au collège, mon meilleur ami a découvert une librairie spécialisée et me l’a fait découvrir à son tour. Nous pouvions y lire des manga, nous retrouver et jouer à la console dans l’arrière-boutique. C’est un grand lecteur, et il lisait beaucoup. Il m’a fait découvrir plein de nouveaux manga, tout aussi beaux graphiquement que touchants émotionnellement. Ce n’est qu’au lycée que j’ai commencé à m’intéresser au Japon. Je voulais savoir d’où venaient ces histoires qui animaient mes pensées, ces paysages époustouflants et ces personnages hauts en couleur.
  • ✍A quel âge as-tu commencé à dessiner ? Et pourquoi ?
J’ai commencé à dessiner en septembre 2020, à l’âge de 19 ans, après la première vague de Covid-19. Comme je l’ai dit précédemment, cela m’a permis de sortir la tête de l’eau après beaucoup de problèmes personnels. Je devais et voulais redécorer mon appartement étudiant et retrouver mes passions oubliées. La seule idée qui m’est venue pour le faire à moindre coût a été de prendre des feutres premier prix chez Action et de commencer à dessiner mes personnages de manga favoris. Cela m’a permis de renouer avec le manga que j’avais perdu de vue après mon bac scientifique. J’ai ensuite commencé à poster mes dessins sur les réseaux sociaux pour passer le temps, et c’est ainsi que j’ai découvert un nouveau monde, un monde plein de talents dont je voulais faire partie.
  • 📖 Est-ce que tu as des inspirations ? Comme un manga ou anime préféré ?
Scénaristiquement parlant, non, pas vraiment. Pour ce qui est du dessin, je n’ai pas de manga ou de mangaka particulier en tête. Cela dépend beaucoup de mon état d’esprit du moment. Je suis probablement plus inspiré par le shonen ou le seinen en termes de graphisme. J’aime beaucoup le détail et les belles ambiances, et pour cela, je pourrais citer « The Promised Neverland », un manga avec une histoire et des ambiances superbement représentées ainsi qu’un style graphique magnifique. Posuka Demizu est une artiste que j’apprécie énormément, autant dans son style de dessin manga que dans ses illustrations en couleur. La façon dont elle gère les couleurs et les ambiances qu’elle souhaite représenter est vraiment superbe. Je lis aussi beaucoup de manga humoristiques, les expressions faciales exagérées m’amusent énormément, et dans ce style, je pourrais citer « Grand Blue », un manga plein de délires de jeunes qui découvrent la vie étudiante avec de beaux paysages sous-marins en arrière-plan, car ce manga traite aussi de plongée sous-marine !
  • C’est quoi ton rêve ? L’ultime but ?

Mon rêve ultime… honnêtement, difficile d’en choisir un. Comme le dit souvent ma chérie, je suis un grand rêveur qui a tendance à trop rêver, ahah. Comme tout dessinateur, je rêve de pouvoir vivre de ma passion pour le dessin, voir mon art reconnu aux quatre coins du monde, partager mon savoir-faire, rencontrer plein de dessinateurs, ne jamais m’arrêter d’apprendre de nouvelles techniques. Voir mon manga édité au Japon et obtenir une adaptation animée serait aussi un rêve. Mais j’ai aussi une passion pour le voyage, découvrir de nouveaux paysages, de nouvelles cultures, de nouveaux plats. J’aime créer de nouveaux scénarios à partir de mes voyages ou même de mes rêves nocturnes. Je rêve de pouvoir un jour mettre les pieds au Japon et visiter tous les paysages qui ont bercé mon enfance et qui m’ont guidé jusqu’ici.

  • Comment se passe les études de dessin manga ? Partage nous ton expérience.
Honnêtement, plus ou moins bien ! La charge de travail est assez colossale et le fossé entre la première et la dernière année est immense ! Mais c’est aussi incroyable de se voir progresser à ce point, rencontrer des professionnels du métier, échanger avec eux et découvrir des choses qu’on n’aurait pas forcément faites par nous-mêmes. Pour ma part, j’ai découvert un nouveau rythme de travail. Dès la première année, la charge de travail était immense. Toutes les matières nécessitent de nouveaux apprentissages, des techniques de manga jusqu’au dessin classique et au modèle vivant. Ce rythme de travail a continué en deuxième année, ce qui m’a fait lâcher les réseaux sociaux. Là où je postais tous les jours, je ne postais plus qu’une fois par mois. Je voyais mes progrès arriver tellement vite qu’aucun dessin que je faisais ne me plaisait. C’était assez frustrant à vivre, mais heureusement, mes proches étaient là pour m’encourager.
  • 💜Qu’est-ce que tu as préféré apprendre ?
Je pense que j’ai tout aimé apprendre. Tout m’a semblé intéressant et nécessaire, car au final, dans le manga, on se retrouve à devoir utiliser tellement de techniques que tout peut s’appliquer. Que ce soit le modèle vivant pour l’anatomie, le dessin classique pour savoir dessiner des objets correctement ou même les techniques d’arrière-plan de jeux vidéo qui peuvent illustrer des fonds de case pour les décors. Après, le modèle vivant est ce qui me laisse le moins bon souvenir car j’étais très mauvais et c’était super fatigant pendant trois heures. Sinon, c’est vrai que les cours de manga étaient super amusants à faire et puis c’était aussi pour cela que je m’étais inscrit, découvrir le travail à la plume était vraiment super intéressant.
  • ✨ Quel est ton plus beau dessin selon toi ?
Selon moi, mon plus beau dessin manga serait soit une de mes planches de mon dernier projet « Étoiles Brisées » où j’ai pu appliquer tout ce que j’ai appris pendant ces trois années, ou alors une couverture de roman en couleur mettant en scène une jeune femme maniant la magie du feu. Je pense avoir bien représenté les ambiances que je voulais faire ressortir sur ces dessins et j’en suis particulièrement fier. Maintenant, il est fort possible que depuis que j’ai écrit cette interview, mon dessin favori ait changé car ce sont souvent mes derniers dessins qui me semblent les meilleurs ! (Heureusement d’ailleurs).  
  • 💭 As-tu des projets à la sortie de ton école ? Un manga peut-être ?
Oui ! Comme je l’ai mentionné un peu plus haut, je travaille déjà sur un manga avec Punchline Édition. Je suis codessinateur avec @Ed_arya sur « Les Héritiers de Merlin » pour l’adaptation graphique d’un roman d’Élodie Loisel.
  • 📝Est-ce que l’on peut avoir une avant-première ?
Dès que possible, je pourrai sûrement fournir quelques planches finalisées !
  • 🏠 Comment ça se passe avec une maison d’édition ?
Tout dépend des maisons d’édition honnêtement. Pour ma part, nous sommes assez libres, nous avons une deadline à respecter et notre éditrice nous fait ses retours sur nos storyboards que nous envoyons pour savoir si nous sommes sur la bonne voie. Comme nous travaillons sur une adaptation d’un roman, c’est particulier et ce n’est pas toujours facile de représenter ce que l’auteure a voulu dire ou montrer dans son roman. Pour le dessin des personnages, nous nous basons essentiellement sur la description physique faite par l’auteure, mais le manga étant en noir et blanc, nous devons faire abstraction des détails de couleur et trouver une alternative.
  • 😓 Pas trop de pression ?
Honnêtement, la pression était surtout due aux rendus de l’école jusqu’à présent, mais maintenant que c’est terminé et que nous réalisons que la deadline approche, effectivement, cela en donne un peu plus. Surtout que c’est notre premier manga édité et que nous ne savons pas encore trop à quoi nous attendre. C’est un grand pas vers l’inconnu mais c’est tout autant excitant car c’est aussi un pas qui nous rapproche un peu plus de notre rêve !
  • ✍ Quelle est la partie la plus difficile dans la création d’un manga selon toi ?
Selon moi, c’est le storyboard ! Il n’est pas rare de devoir refaire une même scène sept à dix fois pour trouver la meilleure façon de la représenter. Le découpage des cases est super important, tout comme ce que l’on veut représenter avec les plans de caméra et les ambiances de lumière. Tout cela donne une infinité de possibilités et c’est ce qui doit être défini sur le storyboard, c’est pourquoi c’est, selon moi, la partie la plus difficile.
  • 💭 La vie de mangaka est souvent idéalisée, quelle est la chose dont on parle le moins quand on se lance dans le manga ?
C’est vrai, et il est selon moi important de bien faire la différence entre la vie de mangaka au Japon et en France car le marché est totalement différent et la production aussi. En France, nous n’avons pas le même suivi qu’au Japon. La rémunération et la charge de travail sont bien différentes et en France, il est difficile de pouvoir vivre en tant que mangaka. Il n’y a pas non plus tout le système d’assistants, bien trop coûteux en France. C’est une des raisons pour lesquelles il est difficile de rentrer dans ce monde et de se faire un nom, car le marché français est inondé par celui du Japon. Il y a une comparaison constante entre la France et le Japon, mais avec des moyens différents et un public différent aussi. C’est pourquoi, selon moi, il faut aussi faire la différence entre mangaka français et japonais.
  • 💪 Est-ce que tu dirais qu’il faut du talent pour se lancer en dessin ?
Je ne le dirais pas et je ne le pense pas non plus. Selon moi, il faut beaucoup de volonté et être déterminé. Il faut aussi avoir un mental prêt à encaisser la critique, être prêt à recommencer et à recevoir des refus. En revanche, il est vrai que pour le manga en France, les maisons d’édition sont très regardantes sur la qualité du dessin là où les maisons d’édition japonaises le sont beaucoup moins.
  • 🏢 Est-ce qu’il faut passer par une école selon toi pour apprendre le dessin ?
Absolument pas. Une école permet certes d’obtenir un certain rythme, des conseils et une méthode de travail, mais il est tout à fait possible de s’en sortir sans passer par une école. L’école, c’est un peu comme une formation accélérée. Elle permet de se concentrer exclusivement sur le dessin sans avoir de perturbations extérieures. Elle permet aussi d’obtenir certains contacts, d’avoir des relations et de créer des liens avec d’autres artistes. Mais si vous êtes rigoureux, studieux, que vous avez les bonnes méthodes d’apprentissage et que vous savez utiliser les réseaux à votre avantage pour rencontrer de nouvelles personnes, vous pouvez vous en sortir tout seul.
  • 😊 Un dernier conseil pour ceux qu’ils veulent se lancer ?
Si le dessin est une passion pour vous, réfléchissez avant de vous lancer. Assurez-vous d’abord que ce n’est pas une passion passagère, que vous avez envie d’en faire un travail. Que vous êtes déterminé à promouvoir et valoriser vos dessins pour les vendre. Parce que si vous voulez vivre de votre art, vous allez devoir vous battre et faire face à une concurrence énorme. Soyez fort et ouvert aux différentes opportunités qui se présentent à vous.

Merci beaucoup à Matt alias dessins2matt d’avoir répondu à mes questions ! 

Je vous invite à le suivre sur Instagram, Tiktok, Twitter, ou sur son site web, pour vous tenir au courant de la sortie de son manga !

A propos de Mélissa Berger

Connue sous le pseudonyme Shoko-sensei, je suis la fondatrice de Cours de Manga. Passionnée par les mangas et le dessin, je mets toutes mes connaissances au service de ceux qui veulent apprendre le dessin manga.

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